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Kôrô Abou, artiste- comédien et humoriste ivoirien: « Nos hommes politiques n’ont pas encore compris l’importance du 7e art »

Abou Dramane Dramé  à l’état civil, Kôrô Abou a fait les beaux jours des séries télévisées « Cour Commune », « Ma Famille » et « Ma Grande Famille ». Tout est parti d’un coup de foudre entre l’art théâtral et lui, alors qu’il n’était qu’un adolescent. Même s’il avoue ne pas encore être millionnaire avec « Cour Commune », il dit avoir le moral haut pour continuer son métier au vu des retours qui lui parviennent. D’après lui, la direction de la RTI 2 lui a confié que « Cour Commune » est classée parmi les séries télévisées les plus regardées. Nous avons rencontré Kôrô Abou, l’acteur-comédien, humoriste, réalisateur et producteur, dans son bureau à Treichville. Et voilà ce qu’il nous a confié.

 

EVASION : Qui est Kôrô Abou ?

 

A l’état civil, c’est Abou Dramane Dramé, connu sous le pseudonyme Kôrô Abou. Certains m’appellent « Beau » par rapport à un film où j’incarnais un rôle à travers lequel on m’appelait « Beau ».

 

On vous voit faire du théâtre, de l’humour et du cinéma, quel est votre secret?

 

Je fus comédien d’abord, après j’ai suivi une formation en théâtre. A ce moment, l’humour était méconnu en Côte d’Ivoire. J’ai créé une école de formation en comédie. Etre acteur de théâtre, c’est aussi être acteur de cinéma, il s’agit seulement de changer de personnage, de se mettre dans la peau d’un autre personnage. Avec l’école de formation, on s’est rendu compte que nous étions confrontés à une crise. Comme  il fallait distraire les gens, il nous fallait chercher encore des textes et des émotions. Quand on va au théâtre, c’est pour réfléchir et non pour rire. Il fallait donner la joie à nos différents fans. Donc, nous nous sommes lancés dans l’humour, nous avons travaillé dans ce sens. Aujourd’hui, nous formons de jeunes humoristes, sinon à l’origine, je suis comédien.

 

On vous voit également réaliser des films, des séries télé. Vous avez donc plusieurs cordes à votre arc ?

 

Je dirai que la réalisation du film s’est imposée à moi. Dans notre milieu, pour se faire connaître, ce n’est pas facile : il faut aller jouer dans les secteurs, montrer de quoi on est capable. Or, à travers le cinéma, on arrive à démontrer rapidement nos talents au reste du monde. Vu que j’ai plein d’élèves qui sortent chaque année de mon école, il fallait trouver une lucarne pour que ces élèves puissent s’exprimer. C’est dans ce cadre qu’en réfléchissant, je me suis mis à travailler, puis j’ai laissé ma vision personnelle et décidé d’aider les autres. C’est ainsi  que je me suis formé dans la réalisation et j’ai décidé de faire également de la production, au lieu d’aller quémander aux sociétés et aux hommes riches de gauche à droite. Quand je fais mes spectacles et que j’aie de l’argent, je l’utilise pour la production. J’ai mon matériel de réalisation de films et une équipe avec laquelle je travaille. Quand on a un projet, on s’associe et on discute pour son aboutissement.

 

Réaliser un film demande beaucoup d’argent. Alors, comment vous en sortez-vous financièrement ?

 

C’est vrai que le cinéma demande toujours de l’argent, mais chez nous en Afrique, quand on tend toujours la main, finalement votre coup de fil, on ne le prend plus, on vous évite. Nos hommes politiques, nos décideurs, n’ont pas encore compris l’importance du 7e art. Même nos prestations humoristiques, c’est quand ils s’ennuient qu’ils songent à les suivre. C’est quand ils sont stressés ou le jour qu’ils ont un mariage, qu’ils font appel aux artistes. Sinon, ils se disent que ce n’est pas un milieu où ils investiront leur argent. Je suis sûr qu’ils n’ont rien compris de l’utilité de l’art. Si nous les comédiens artistes devions attendre leur aide financière pour évoluer, nous perdrions tout. Donc chacun d’entre nous doit faire un peu d’effort. Le boulot que je fais avec la comédie, me permet de m’en sortir financièrement. Si j’obtiens un contrat, je mets un peu d’argent à côté pour la production, je ne fais pas la belle vie dans les bars, maquis et boîtes de nuit. Mon équipe technique et les acteurs sont payés par mois  et cet argent vient des cachets de mes prestations.

 

Beaucoup de gens ont découvert votre talent dans les séries télévisées « Ma Famille «  et « Ma grande Famille ». Dans un film, chaque comédien a un texte. Vos textes sont-ils écrits avec un mauvais français comme vous le rendez dans les films ?

 

Parler un faux français dans un film, c’est ma touche particulière. C’est ce qui m’a été demandé par la productrice et réalisatrice Akissi Delta. Mon texte est écrit en bon français et c’est moi l’acteur qui doit le rendre en faux français. Mais souvent, ce n’est pas avantageux pour l’acteur car le public le découvre avec ce personnage et veut qu’il reste ainsi dans tous les spectacles et films. Par exemple, dans la série « Ma Grande Famille », si je parlais un bon français ou si je « shorbitais », les téléspectateurs auraient interpellé la réalisatrice pour dire que je joue mal dans le film. Donc, elle était obligée  de m’utiliser dans le même personnage. Ainsi, quand quelqu’un me fera appel pour jouer dans un autre film, ce sera toujours dans le même esprit que je parle un faux français.

 

N’est-il pas difficile de parler un faux français, quand on sait que vous vous exprimez très bien en français ?

 

Oui, c’est un peu difficile, mais quand on est formé en comédie pour cela, on peut s’y adapter.

 

Quels sont vos projets  à court terme?

 

J’ai beaucoup de projets, actuellement : j’ai repris une autre saison de ma série « Cour Commune ». A chaque production, il y a différents pays qui interviennent avec leurs acteurs comédiens : le Mali, le Togo, le Burkina représenté  par Souké (Bobodioufs) et Zenabo Zongo (ZZ). Dans la nouvelle saison, on aura encore des comédiens burkinabè comme Oyou, Sidiki (Bobodioufs). Je suis actuellement en discussion avec Abodulaye Komboudri et si tout va bien, lui aussi va jouer dans la nouvelle saison, pour que la série « Cour Commune » soit une grande Cour Commune. Il faut prouver aux gens que nous avons des talents en Afrique qui peuvent bien faire le cinéma. Souvent, c’est par manque de moyen financier qu’on n’y arrive pas.

 

Une fois le montage de la série terminé, comment faites-vous pour que les télévisions nationales puissent l’exploiter?

 

Au début de « Cour Commune », j’étais en co-production avec la RTI et notre contrat de co-production ne permettait pas aux autres chaînes de télévisions d’exploiter notre film. Donc, j’étais obligé de faire un autre film, « Vieux Brahama », qui passe actuellement sur la télévision « Télé Sud ». Maintenant, je ne suis plus en co-production avec la RTI. Donc, la nouvelle saison de « Cour Commune » pourra être exploitée par les autres chaînes de télévisions.

 

Un mot pour conclure ?

 

Je dis merci à mes multiples fans, je demande à Dieu de les protéger, car ce n’est pas évident. Nous les acteurs comédiens sommes nombreux, et si ces derniers prennent leur temps pour m’apprécier, cela me va droit au cœur. Je l’ai toujours dit, sans nos fans, nous les artistes ne sommes rien. C’est pour les fans que nous faisons des efforts  pour donner un bon rendement, mais sans nous, eux sont quelque  chose.

 

Propos recueillis à Abidjan par Evariste Télesphore NIKIEMA

 

 

 

 

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