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MADOU KONE, ARTISTE MUSICIEN-INSTRUMENTISTE: « Il faut qu’on mette l’accent sur la formation des jeunes »

Madou Koné n’est autre que l’auteur de la célèbre chanson « Je vais à Bobo » qui est l’hymne de la Semaine nationale de la culture (SNC). Membre fondateur de la mythique formation Volta Jazz et fondateur de l’Ensemble artistique de Bobo-Dioulasso, il a été sacré trois fois Grand prix de la SNC. Depuis 1973, voilà cinquante ans qu’il écume les scènes à travers le Burkina, l’Afrique et le reste du monde.

Les Kundé 2023 lui ont décerné le trophée kundé d’honneur et nous avons profité de son séjour à Ouagadougou pour cette interview exclusive qu’il a bien voulu nous accorder.

L’artiste revient sur des grands souvenirs à travers les quatre coins du monde, de sa rencontre avec le capitaine Thomas Sankara, dresse un bilan de sa riche carrière, jette un regard critique sur l’évolution de la musique burkinabè, parle de ses projets, de la renaissance du Volta Jazz, de son quotidien, aborde sans détour d’autres sujets et lève le voile sur sa situation matrimoniale. Lisez plutôt.

Evasion : Comment allez-vous ?

 

Madou Koné : Je vais super bien.

 

Que représente le Kundé d’honneur que vous venez de recevoir ?

 

Ce trophée d’honneur représente un travail qui a été fait durant toute ma carrière et que je continue d’exercer avec passion, c’est-à-dire la musique, depuis 1973 jusqu’à nos jours. Je dédie ce trophée à ma famille, à tous mes amis, à tous ceux qui travaillent avec moi et à mes fans. Ce Kundé consacre tout mon parcours et je suis très fier.

 

Après 50 ans de parcours musical, êtes-vous satisfait du bilan de votre carrière ?

 

D’abord, je remercie Dieu qui m’a donné une longue vie. Si j’ai pu faire 50 ans de carrière, c’est quelque chose de grand. Durant tout mon parcours, je n’ai rien regretté du tout. J’ai pratiqué ce que j’aime le plus, c’est-à-dire la musique, et cela dans de bonnes conditions. J’ai eu une carrière très riche en matière de contacts et d’échanges avec beaucoup de peuples, d’artistes et de groupes musicaux.

 

Vous avez parcouru tous les quatre coins du monde, quels sont les souvenirs qui vous ont le plus marqué ?

 

Il y a énormément de grands souvenirs qui m’ont marqué. D’abord ma première participation à un festival international c’était à Lagos en 1977 au Festival panafricain des arts et de la culture. Il y a eu aussi ma participation en 1983 à Tripoli au Festival panafricain des arts et de la jeunesse, en 1987 en Inde ainsi qu’une tournée de six mois avec sept compagnies de théâtre en France, en Russie, en Pologne, en Tchécoslovaquie à l’époque, en Allemagne, en Suisse et au Danemark. Ce fut des moments très riches et inoubliables.

 

Peut-on savoir la petite histoire de votre rencontre avec le capitaine Thomas Sankara ?

 

C’est toujours dans le domaine de la musique. J’ai participé à l’ouverture officielle du Fespaco en 1983 avec ma troupe qui est l’Ensemble musical de Bobo-Dioulasso. Cette ouverture était présidée par le capitaine Thomas Sankara et juste après la cérémonie, il m’a fait venir au palais présidentiel pour parler de projets culturels qui lui tenait à cœur.

 

Quel est votre regard sur l’évolution de la musique burkinabè ?

 

Je trouve que la musique burkinabè est en plein essor. Il y a beaucoup d’artistes qui se dégagent du lot et qui font un bon travail. J’apprécie tous ceux qui s’inspirent de nos rythmes traditionnels et donnent une couleur afin de donner une identité à notre musique. Il faut partir de cette base pour pouvoir s’imposer au plan international.  La matière première c’est notre musique traditionnelle et il faut que les jeunes s’inspirent de ça. Mais je n’en veux pas à ceux qui font autre chose.

 

Pouvez-vous nous parler de la petite histoire de cette chanson culte « Je vais à Bobo » ?

 

J’ai composé cette chanson quand j’étais en tournée en Suisse. Je devais rentrer à Bobo juste avant la Semaine nationale de la culture (SNC 90). Je me suis dit pourquoi ne pas faire une chanson pour cette manifestation aussi grandiose. Après ma tournée, quand je suis arrivé à Bobo-Dioulasso, j’ai pris ma guitare et je suis allé à Radio Bobo pour dire que j’ai une chanson sur la SNC à leur proposer. Et quand la chanson a commencé à passer à la radio, elle a beaucoup accroché et le ministre de la Culture à l’époque a donné instruction pour qu’elle soit considérée comme l’hymne de la SNC. Et en 2010, le ministère de la Culture a produit le clip du titre. C’est aussi le ministère de la Culture qui m’a envoyé en studio afin d’enregistrer la chanson dans les bonnes conditions.

 

Quels sont vos projets ?

 

Les projets ne finissent pas avec l’expérience que nous avons. Il faut qu’on mette l’accent sur la formation des jeunes. C’est ainsi qu’à Bobo, nous avons fait renaître le Volta Jazz des années 65 de ses cendres en faisant appel à des jeunes qui jouent avec nous. Nous transmettons à ces jeunes, notre expérience. Nous avons joué à Jazz à Ouaga, à l’ouverture du centre culturel les Bambous Idrissa Koné qui est le fondateur du Volta Jazz ainsi qu’à l’ouverture de la SNC. Les projets ne manquent pas, nous continuons d’animer les soirées dansantes pour la nouvelle et l’ancienne génération.

 

A quand la sortie de votre prochain album ?

 

Il faut qu’il ait un producteur pour que je puisse faire un nouvel album. La musique n’a pas d’âge, nous avons des problèmes pour trouver des producteurs à notre âge sinon ce n’est pas le talent qui manque.

 

Quel est votre quotidien ?

 

Le matin, je navigue sur mon ordinateur pour avoir les informations musicales, sportives et bien d’autres actualités. Ensuite, je rejoins mes copains. Il y a aussi les répétitions avec le Volta Jazz. En tout cas, la journée est très chargée, je ne m’ennuie pas du tout.

 

Vivez-vous de votre musique ?

 

Je ne vis pas de la musique en tant que tel. Moi, j’ai travaillé pendant près de 40 ans comme agent de bureau à l’Onatel. J’ai eu une très bonne retraite et en réalité, c’est de ça que je vis. Et à côté, je fais la musique pour mon propre plaisir.

 

Quelle est votre situation matrimoniale ?

 

Je suis marié et père de cinq enfants.

 

Que feriez-vous si l’un de vos enfants décidait de suivre vos pas dans la musique ?

 

(Il éclate de rire)… Je vais l’encadrer et l’encourager à œuvrer dans ce sens.

 

Qu’avez-vous à dire à vos fans ?

 

Je leur demande de persévérer dans tout ce qu’ils font, seule la persévérance paye. Je leur dis grandement merci de m’avoir supporté durant ces 50 ans de carrière.

 

Quelle est votre réaction face à la crise sécuritaire que traverse le Burkina Faso ?

 

A l’heure actuelle, tout Burkinabè doit avoir un élan patriotique. Chacun doit se battre à son niveau pour le retour de la paix. Ça fait vraiment mal au cœur ce qui nous arrive.

 

Qu’avez-vous à dire pour conclure ?

 

Je dis merci beaucoup aux Editions « Le Pays », ma dernière interview avec votre journal remonte à presque vingt ans. (Il éclate de rire)… Je dis merci à tous vos lecteurs.

 

Propos recueillis et transcrits par Aboubakar Kéré KERSON

 

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