Au fil des semaines

RECONCILIATION NATIONALE AU BURKINA FASO: Quand les acteurs manquent de sincérité !

« Les bouches réclament la paix. Les actes préparent la guerre. Telle est la décevante impression qui se dégage de l’observation impartiale des évènements contradictoires d’ici-bas ». Ce constat quasi prophétique d’un des pères de la nation burkinabè, Nazi Boni, dans son œuvre « Crépuscule des temps anciens », semble défier le temps et s’impose aujourd’hui comme la grille de lecture la plus adéquate pour analyser l’impossible réconciliation nationale au Burkina Faso. Alors que les régimes successifs depuis l’épilogue tragique de la Révolution d’août 1983, n’ont eu de cesse d’appeler les Burkinabè à décharger leurs cœurs des toxines de la rancœur pour se donner la main sur le difficile chantier de la construction nationale, ils n’ont cessé de jeter l’anathème à leurs prédécesseurs. Ainsi Blaise Compaoré a justifié sa sanglante accession au pouvoir, le 15 octobre 1987, par la déviance orbitale de Thomas Sankara, de la trajectoire de la Révolution. Il a été, à son tour, voué aux hégémonies par la Transition de Michel Kafando et le régime du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) du président Roch Marc Christian Kaboré (RMCK). Ce dernier cristallise aujourd’hui toutes les rancœurs des partisans et sympathisants du lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba que d’ailleurs les ouailles du président déchu descendent en flammes dans les discours. L’on est ainsi installé dans un cercle vicieux qui explique la maladive procrastination qui frappe toutes les œuvres de réconciliation nationale.

 

 

Les Burkinabè devraient déjà commencer à désarmer leurs bouches et à les vider de leur venin

 

 

Il faudra donc au ministre Yéro Boly qui occupe aujourd’hui le portefeuille de la réconciliation nationale après Zéphirin Diabré sous le régime de RMCK et Ram Ouédraogo sous Blaise Compaoré, plus que de la baraka pour vaincre le signe indien ou plutôt burkinabè. Il lui faut surtout une forte dose  de volonté politique pour réussir sa mission de faiseur de paix si véritablement ceux qui ont mis sa main à la pâte, ne lui ont pas tendu un piège. En tout cas, pour l’instant, tout le malheur qu’on lui souhaite, c’est de le voir réussir.

En attendant de voir comment l’homme que l’on sait fin d’esprit, tirera son épingle du jeu, l’on ne peut qu’insister sur l’importance de cette réconciliation nationale qui, on l’espère bien, permettra au peuple burkinabè de solder ses comptes avec l’histoire et de pouvoir utiliser ce passé comme le rétroviseur d’une voiture dans sa marche vers « l’horizon du bonheur » et du progrès. Cette réconciliation qui a toutes les couleurs d’une catharsis sociale et politique. Elle est d’autant plus urgente et nécessaire que les cancrelats et autres vipères qui ont trouvé des nids dans les lézardes du mur de l’unité et de la cohésion nationale, ne pourront en être expulsés que si les Burkinabè s’engagent véritablement dans l’œuvre de restauration et de rénovation de l’édifice communautaire qui détermine l’identité nationale et le vivre-ensemble. Mais comment y parvenir ? Telle est la question que l’on pourrait se poser.

Les débats font rage. Alors que d’aucuns font du triptyque « vérité-justice-réconciliation », le seul chemin, d’autres en appellent à une justice transitionnelle. Sans prendre parti pour l’une ou l’autre option, les Burkinabè devraient déjà commencer à désarmer leurs bouches et à les vider de leur venin.  Et c’est d’ailleurs cette prescription que faisait déjà le patriarche Nazi Boni. « Le jour où les hommes apprendront à savoir se parler les uns aux autres, à faire un vigoureux effort de compréhension et de confiance mutuelles, à sentir qu’ils appartiennent à la même famille, la paix sera à la portée de l’Humanité ». Pour le reste, il suffit d’une once de volonté politique et de foi pour que les montagnes bougent et pour que tous comprennent, comme le disent William Bole, Drew Christiansen et Robert T. Hennemeyer dans leur ouvrage collectif, que le pardon en politique, « fait conjointement appel à la vérité morale, à la renonciation à la vengeance, à l’empathie et à la volonté de réparer une relation humaine brisée ».

 

P.K

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