Reggae maker burkinabè de renommée internationale, Paul Béni est né dans le Sud-Ouest de la Côte d’Ivoire, plus précisément à Zakouea dans la sous-préfecture de Grand-Zattry près de Soubré, où il a grandi et passé son adolescence à Abidjan avant de se retrouver au bercail. A l’état civil Paulin Wendpanga Ilboudo, il est auteur de deux sublimes albums, « Afrique mon cri de cœur », sorti en 2019, « Tougnan » le 23 avril 2023 et d’un single « Déposez les armes ».
De retour d’une tournée ivoirienne et à quelques jours de la sortie de son troisième album, il a bien voulu s’ouvrir à nous à travers cette interview.
L’artiste revient sur sa tournée en terre ivoirienne, décortique son prochain album, dresse un bilan de sa carrière, jette un regard critique sur le reggae burkinabè en affirmant que la musique au Faso manque de soutien et de promotion. Il dévoile ses projets et aborde sans détour d’autres sujets assez croustillants. Lisez plutôt.
Evasion : Comment allez-vous ?
Paul Béni : Je vais super bien.
Quel est votre état d’esprit actuellement ?
Mon moral est au top. Actuellement, je reviens d’une tournée ivoirienne, tout s’est très bien passé et je profite dire merci à tous mes fans de la Côte d’Ivoire qui se sont véritablement mobilisés à toutes mes sorties dans les différentes villes.
Qu’est ce qui vous a motivé à organiser cette tournée en Côte d’Ivoire ?
C’est d’abord pour la promotion de mes albums « Tougnan » hors du Burkina Faso. C’est une première étape d’une tournée qui va me conduire dans d’autres pays de la région ouest-africaine. Nous sommes des ambassadeurs de notre culture et nous devons faire flotter notre drapeau au niveau international. Le choix de la Côte d’Ivoire pour la première étape est lié au fait que j’y suis né, plus précisément dans le Sud-Ouest. C’était une manière d’y retourner pour me faire connaître davantage et communier avec ceux qui me suivent depuis le début de ma carrière.
Comment a été l’accueil ?
C’était un accueil très chaleureux, je ne m’y attendais vraiment pas. C’était des moments de retrouvailles et festifs. J’ai joué à guichets fermés dans toutes les villes où je me suis rendu. Et c’est aussi l’occasion pour moi de dire merci au comité d’organisation et aux autorités locales. Merci infiniment à Mahama Ouédraogo qui est un opérateur économique, au Colonel Emile Bobia de l’espace Lylyde, Mamadou Nikiéma, Mathieu Kiendrébéogo, opérateur économique à Daradji, et Benjamin Kaboré.
Il est question d’un projet né à l’issue de cette tournée. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Il s’agit d’un festival avec d’autres artistes burkinabè et ivoiriens. Cela va permettre un pont entre les deux pays et permettre à nos artistes musiciens d’aller se frotter au public ivoirien et de favoriser également un brassage culturel.
Quels sont les autres projets en cours ?
Il s’agit de la sortie du nouvel album prévue pour le mois d’avril de cette année 2025. Bien avant cette date, il y a le lancement du single Burkina pour début février, un titre qui annonce les couleurs du nouvel opus.
Que représente le 23 avril pour vous car la précédente sortie discographique a eu lieu un 23 avril ?
(Il éclate de rire) … C’est un choix personnel. Le précèdent album est sorti un 23 avril et m’a porté chance. Donc ainsi j’ai décidé de sortir tous mes albums un 23 avril. Tout simplement c’est une date qui me porte bonheur.
Quelle va être la particularité de ce nouvel album, comparativement aux précédents ?
Sa particularité réside dans le choix des thèmes et la variation des sonorités. Je parle de la diaspora où je l’exhorte à retourner souvent aux sources pour ne pas être déconnectée de ses racines afin d’envisager la prospérité dans leurs activités. J’aborde des sujets de sensibilisations, la paix, la cohésion sociale et d’autres faits de notre vécu quotidien. Au niveau de la rythmique, il y a des instruments traditionnels qui y interviennent pour un reggae spécial qui représente mon identité et va comporter huit titres.
Les reggaes maker sont considérés comme des artistes aigris et révoltés. Est-ce que vous vous identifiez à cela ?
L’artiste s’exprime en fonction des situations qu’il vit. Je dirai que ce sont des stéréotypes. Très souvent, on les considère comme des aigris ou des révoltés alors que ce n’est pas le cas. L’artiste dénonce les maux qui minent la société. Moi, je ne suis pas aigri, je dis ce que je vois pour que les choses s’améliorent.
N’avez-vous pas souvent peur de dire haut ce que certains pensent bas ?
Non pas du tout. Il y a des gens mieux que nous qui sont partis dans cette lutte. Comme le dit l’adage. « Mieux vaut dire la vérité et mourir de faim, que de mentir pour se remplir le ventre ».
Est-ce que le reggae burkinabè se porte bien de nos jours ?
Le reggae burkinabè se porte bien et se vend très bien. Mais ce qui manque à la musique burkinabè, c’est le soutien et la promotion. Quand on va dans les autres pays, on voit déjà cette différence.
Pensez-vous à la conquête du marché européen ?
Bien sûr que oui. Après la tournée ouest-africaine, nous allons nous pencher sur le marché européen. Et j’ai des connexions avec d’autres artistes d’Europe dans ce sens et les choses avancent positivement.
Quelle est la difficulté majeure d’un jeune reggae maker comme vous ?
La difficulté majeure réside dans la production. Les gens aiment ceux qui disent la vérité et en même temps refusent de les soutenir. Quand on dit des choses qui font leur affaire, ils sont contents. Et lorsque ça ne va pas et qu’on critique, ils ne sont pas contents. Et c’est ce qui fait la complexité du reggae. Et si une maison de production s’ouvre à moi, elle sera la bienvenue. L’auto-production, c’est parce que souvent on n’a pas le choix.
Pensez-vous que vos messages sont perçus par les politiques ?
Bien sûr que oui. Les politiques nous suivent, ils nous écoutent et d’autres prennent nos idées pour appliquer dans leurs projets de société.
Etes-vous satisfait du bilan de votre carrière musicale ?
Oui, je suis satisfait du bilan de mon parcours. C’est une jeune carrière et partout où je passe, le public apprécie ce que je fais et il me donne l’occasion de travailler encore plus. Le public attend beaucoup de moi, je ferai tout pour le satisfaire.
Vivez-vous de votre art ?
Oui, je vis presque de mon art. La musique est un métier comme tout autre. Mais en plus, j’ai une autre activité.
Qu’avez-vous à dire à vos fans ?
Je leur demande de me soutenir davantage et de s’abonner beaucoup à mes pages sur Facebook et YouTube. Je leur dis encore merci. Le nouvel album, c’est pour bientôt et qu’ils sachent que Paul Béni est en train de monter très fort à l’image de stars comme Ticken Jah et Alpha Blondy.
Quels sont vos vœux pour cette nouvelle année 2025 ?
Je souhaite le retour de la paix au Burkina Faso. S’il y a la paix, on pourra tourner un peu partout dans le pays. Ensemble main dans la main, pour atteindre cet objectif.
Qu’avez-vous à dire pour conclure ?
Je vous réitère mes sincères remerciements pour cette marque de considération envers ma modeste personne pour parler de mon actualité. Encore merci.
Propos recueillis et transcrits par Aboubakar Kéré KERSON