Arts et culture

SUSPENSION DES ACTIVITES CULTURELLES POUR CAUSE DU COVID-19: Le calvaire des artistes

Le Burkina Faso organise, chaque année, des évènements culturels d’envergure nationale et internationale. Depuis le 9 mars 2020, il a connu ses premiers cas de COVID-19. Ce qui a amené les autorités et plusieurs acteurs privés à reporter sine die plusieurs rendez-vous culturels. Comment les acteurs vivent cette situation ? Nous sommes allés à leur rencontre le 1er avril dernier.

La Semaine nationale de la culture ; les Faso music awards (FAMA) ; les deux concerts à Bobo-Dioulasso et à Ouagadougou de l’artiste Tiken Jah Fakoly pour ne citer que ces évènements, ont été reportés à cause de la pandémie du Covid-19.  Cette situation est difficile à supporter par plusieurs acteurs culturels que nous avons rencontrés le 1er avril 2020.  En effet, tous les contrats de prestation et autres activités ont été suspendus. A l’image des autres artistes chanteurs du Burkina Faso, Ouédraogo Désiré alias Dez Altino a, à son corps défendant, annulé tous ses spectacles. Et ce pour deux mois.  A l’en croire, il produit en moyenne, 20 spectacles par mois ce qui fait mathématiquement 40 spectacles. Le manque à gagner est énorme selon ses dires. Il est estimé à 32 millions de F CFA en raison de 800 000 F CFA par prestation. En plus des prestations sur scène, il a aussi annulé ses séances de  répétition,  résidence de création et autres.  Ce gros manque à gagner se ressent chez l’ensemble des acteurs de la filière musique. Et ce n’est pas Ibrahim Zerbo, président de l’Association des managers professionnels de musique du Burkina et opérateur culturel qui dira le contraire.  « Chacun de nous est durement touché par cette crise de COVID-19 parce que nul n’avait prévu cette catastrophe », dit-il avant d’ajouter que la situation est difficile à supporter.   Par exemple, l’ensemble des contrats, des tournées, dédicaces de l’artiste chanteur dont il gère la carrière, en l’occurrence Malika La Slamazone a été annulé. Pire, même son spectacle qui devait avoir lieu au Canada le 21 mars dernier a été annulé.  Ce qui a un impact négatif sur ses activités. « Le manager est payé en fonction des contrats de prestation. Si l’artiste qui est votre patron n’arrive pas à travailler, ce n’est pas vous qui serez payé », ironise-t-il. Tout comme eux, les promoteurs de spectacles ne savent pas où mettre la tête. « C’est un arrêt total de toutes les activités culturelles. Comme c’est une crise sanitaire mondiale, il va falloir qu’on respecte les consignes éditées par le ministère en charge de la Santé. En attendant de voir le bout du  tunnel, je préfère appeler à la responsabilité des uns et des autres pour faire face à cette pandémie. Si on en sort tous en bonne santé, on pourra faire des projections », a laissé entendre Salfo Soré, dit Jah press, Commissaire général des Kundé allusion faite à la prochaine édition des Kundé qui célèbre aussi cette année son 20e anniversaire.  Si la crise liée au nouveau coronavirus met en berne toutes les activités culturelles, elle n’a pas réussi à faire perdre espoir aux acteurs culturels. Mieux, certains d’entre eux ont pris des incitatives pour rester en contact avec leurs fans. Le conteur professionnel, Kientega Pingdéwindé Gérard, dit KPG, organise chaque soir, à partir de 19h, une séance de conte sur sa page Facebook. Dez Altino ne fait pas autre chose que d’organiser à la même heure chaque soir, un Facebook live pour communier avec ses fans d’une part, et sensibiliser d’autre part. Mieux, en plus des soutiens à ses voisins du quartier Cissin de la ville de Ouagadougou, le « prince » national   a même composé une chanson intitulée « Covid-19 dégage » pour apporter sa pierre à la lutte contre cette maladie qui endeuille des familles dans le monde. Le clip de ce single est déjà diffusé par certaines chaînes de télévision de la place. Pour rester visibles sur la scène de la culture, les acteurs de ce secteur peuvent compter sur les journalistes culturels comme Tibiafouba Madiéga, directeur de publication du magazine culturel Africa Start.  « Toute crise engendre une crise. », relativise-t-il avant d’expliquer : « Il y a la crise sanitaire  qu’il faut combattre mais il y a la crise de survie qu’il va falloir juguler coûte que coûte. Tous les secteurs d’activités sont touchés.  Si le secteur économique connaît des difficultés, il va de soi que celui de la culture soit touché. Nous ne pouvons qu’accompagner la société à travers la sensibilisation », affirme celui-là même qui se fait appeler le TGV de l’information.

 

La résilience des artistes

 

Pour faire face à la crise sanitaire qui entraîne d’autres crises pour reprendre l’expression du DP de Africa Star, le Bureau burkinabè du droit d’auteur (BBDA) entend prendre des mesures.  Il examine avec intérêt, les doléances du  Syndicat national des artistes musiciens du Burkina Faso (SYNAMUB) à savoir payer les droits d’auteurs des membres avant le date prévue afin de leur permettre de faire face à la situation. « Tout en laissant le soin à mes techniciens de fournir les éléments de réponse au SYNAMUB, je voudrais rassurer les membres de ce syndicat que le BBDA malgré le contexte délétère, travaille à l ‘anticipation dont l’objectif est de pouvoir procéder à la répartition des droits au profit des bénéficiaires dans les meilleurs délais. », a indiqué le Directeur général du BBDA, Walib Bara pour qui la crise du coronavirus représente une menace mondiale pour les créateurs et les auxiliaires de la création. Malgré tout, relève-t-il, des artistes en dépit de leur fragilité économique, sont montés au créneau en mettant en lumière leur génie créatif dans la sensibilisation sur le Covid-19. Suite à la mesure de fermeture des bars et maquis, les salles de spectacles, c’est une bonne partie des revenus de nos créateurs qui rentre en crise. Mais qu’à cela ne tienne, confie Walib Bara, le BBDA poursuit, malgré la psychose, ses actions de soutien d’aide à la création, c’est dans cette optique que les résultats du FPC ont été publiés en fin de semaine dernière. « Le fonds d’aide aux créateurs du troisième âge également publiera la liste des bénéficiaires cette semaine »,  a-t-il promis. Même si la crise arrête des activités de certains utilisateurs d’œuvres du répertoire du BBDA, cela entraîne inéluctablement l’arrêt des activités de collecte des droits par le BBDA. « Les droits d’auteur n’étant payés qu’après l’exploitation et la diffusion des œuvres, cela signifie qu’à partir de 2021, les membres du BBDA vont être frappés par une forte baisse de leurs revenus », prévient Walib Bara. Et de souhaiter la prise en compte du secteur de la culture dans le cadre des mesures d’urgence annoncées par le gouvernement. Au moment où nous tracions ces lignes, on apprend que le président du Faso a mis à la disposition des acteurs de la culture, 1,25 milliard de F CFA.

 

Issa SIGUIRE

 

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