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RAS AFRYAM DANDY, REGGAE MAKER: « Pour qu’un pays change, il faut un changement des mentalités de sa population »

Ras Afryam Dandy à l’état civil Martin est un reggae maker originaire de la ville de Koudougou dans le Centre-Ouest du Burkina Faso. Issu d’une famille de chansonniers, il sera très tôt bercé par le reggae aux côtés de ses aînés.

Très jeune, il va à l’école de la vie active au sein de plusieurs sociétés de travaux publics. Engagé dans les luttes syndicales, il est licencié le 6 juin 2006 et réembauché le lendemain par une autre société, et sera défensivement licencié plus tard pour son engagement syndical.

Pour sa carrière musicale, il débute avec des singles très engagés dont « Babylon, prends ton sac » ou « Yes we can kemet » avant de finaliser l’album « L’heure de l’Afrique a sonné ».

A travers cette interview exclusive qu’il a bien voulu nous accorder, l’artiste nous parle sans langue de bois de son parcours, de sa vision de la lutte syndicale, jette un regard critique sur l’état de santé du reggae, revient sur son quotidien et sur son projet qui lui tient à cœur, aborde sans détour d’autres sujets et lève le voile sur sa situation matrimoniale. Lisez plutôt.

 

 

Evasion : Comment allez-vous ?

 

Ras Afryam Dandy : Je vais bien. On sait que la vie n’est pas facile, le peu qu’on a, il faut s’y concentrer pour que ceux qui t’accompagnent et qui ont l’amour pour toi puissent te permettre d’atteindre tes objectifs. Se plaindre à tout moment n’est pas la solution, il faut se battre.

 

Est-ce le fait d’être né d’une famille de chansonniers qui a motivé votre choix pour la carrière musicale ?

 

Au départ, je n’avais pas à l’esprit de faire de la musique, mais c’est mon engagement au niveau syndical qui m’y a conduit. Mes grands-parents étaient des chansonniers, j’ai donc toujours écouté la musique étant tout petit. Mais ce ras-le-bol et l’envie de dire ce que j’ai au fond de moi m’ont conduit vers la musique.

 

D’où vient cette rage en toi de dénoncer tout le temps ?

 

C’est à travers le vécu d’un être que les choses se forgent. Nous Africains, nous ne pouvons pas dire que nous sommes fiers de ce que nous sommes aujourd’hui. Actuellement il y a un combat qui nous permet d’avancer. Et voila pourquoi nous sortons des albums pour accompagner cette transition et cette révolution. Au départ, c’était les luttes syndicales au niveau des travaux publics pour l’amélioration des conditions de travail et de vie des ouvriers.

 

Pour avoir été le secrétaire général de certains comités syndicaux, pensez-vous que le combat a payé ?

 

Nous n’avons perdu aucune lutte menée. Nous avons revendiqué nos droits, nous avons été payés.

 

Pour avoir perdu votre boulot en tant que syndicaliste, avez-vous des regrets ?

 

Pas trop de regret, tant qu’on vit on a toujours de l’espoir. Mais ce qui m’a beaucoup marqué, c’est mon accident lorsque je suis venu pour réaliser mon maxi.

 

Etes-vous un artiste révolté ou aigri ?

 

(Eclat de rire) … Aigri, non. Révolté peut-être. Il faut être un révolté pour pouvoir mener une lutte afin qu’il y ait de l’amélioration. Quand j’ai sorti mon maxi en 2016, la démocratie n’autorisait pas des albums engagés. Mais aujourd’hui, les messages que nous diffusons sont écoutés grâce à cette transition.

 

Et pourquoi avoir choisi le reggae ?

 

J’ai toujours aimé le reggae depuis tout petit. Depuis l’âge de sept ans, j’écoutais le reggae avec mes grands-frères. Et avec le temps, quand j’ai grandi, j’ai compris les messages véhiculés à travers ce style musical. Cette musique nous a accompagnés durant nos luttes syndicales et nos temps de chômage dans les années 2000.

 

Pensez-vous que le reggae se porte bien de nos jours ?

 

Le reggae burkinabè se porte très bien. Il y a des devanciers qui sont des reggae makers de renom, ils sont nombreux et je ne vais pas citer de noms. Si les reggae makers burkinabè ont un problème, c’est parce que les populations ne se tournent pas vers eux pour écouter leurs messages.

 

Quel bilan faites-vous de votre carrière musicale ?

 

Je ne suis pas sorti du territoire national certes, mais il y’a eu des contacts fructueux avec mon public et les médias. J’avais mis l’album en stand-by parce que j’avais d’autres activités.

 

Vivez-vous de votre art ?

 

La musique est un complément de ce que je gagne afin de garder mon nom haut, tout en espérant qu’elle devienne ma principale source de revenus.

 

Quel est le projet imminent qui vous tient à cœur ?

 

C’est une vision pour le réveil de l’Afrique à travers mon œuvre « Espoir de l’Afrique ». Pour qu’un pays change, il faut un changement des mentalités de sa population. Moi quand j’ai fait mon album en 2018, j’ai déposé plusieurs demandes de soutiens au BBDA sans succès. Je trouve que ce n’est pas normal pour quelqu’un qui est affilié à cette structure depuis plus de quatorze ans. Depuis 2008, j’ai chanté « Babylone, prends ton sac ».  Et le projet imminent, c’est la véritable relance de ma carrière pour une véritable conquête du public africain.

 

Qu’avez-vous à dire à vos fans ?

 

Je leur dis merci de m’avoir accepté et je les exhorte à continuer d’écouter mes chansons. Si je grandis c’est grâce à eux, et je les invite à venir chaque fois que je serai en concert.

 

Peut-on savoir votre quotidien ?

 

Difficile de définir le quotidien de quelqu’un qui travaille dans l’informel. Après cette interview, tout coup de fil peut changer le cours de ma journée, je suis un formateur en billard et je fais la réparation des tables de jeux de billards.

 

Quelle est votre situation matrimoniale ?

 

Pas marié, pas d’enfant.

 

A l’avenir, que feriez-vous si un de vos éventuels enfants décide de suivre vos pas dans la musique ?

 

Un homme nait avec une destinée. Il ne faut pas dérouter un homme sur son choix ; on peut lui prodiguer des conseils. Je lui dirai simplement d’être droit et conscient.

 

Quels sont vos vœux pour cette année 2024 ?

 

Je souhaite que le territoire national dans sa globalité soit libéré et que les dirigeants de l’AES puissent concrétiser leurs projets communs et améliorer le quotidien des populations.

 

Qu’avez-vous à dire pour conclure ?

 

Je dis merci à l’association African Initiative de m’avoir compris et choisi pour la lutte. L’album a pris du temps mais l’association a compris le message pour me donner une production. Je dis merci à la Transition pour le travail abattu. Merci à Evasion pour cette marque de considération.

 

Propos recueillis et transcrits par Aboubakar Kéré KERSON

 

 

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