Mariama Bâ est née en 1929 à Dakar, au Sénégal, dans une famille aisée. Son père travailla dans l’administration coloniale française et devint en 1956 ministre de la Santé du Sénégal. Sa mère est morte quand elle était jeune. Elle a été élevée par ses grands-parents maternels qui ont mis l’accent sur les valeurs conservatrices de la société sénégalaise. Elle a fréquenté une école religieuse, mais a également été éduquée dans la tradition française. Grâce à l’intervention de son père, elle est inscrite en 1943 à l’Ecole Normale de Rufisque, une ville située à 25 km de Dakar, où elle a obtenu son diplôme en 1947. Mariama Bâ a été enseignante de 1947 à 1959, avant de devenir inspectrice académique. Au cours de cette période, elle a eu 9 enfants avec son mari, Obeye Diop. Le couple s’est séparé et elle a été obligée d’élever ses enfants en tant que parent célibataire. A la fin des années 1970, après que la plupart de ses enfants sont devenus adultes, Bâ s’est tournée vers les activités politiques. Elle est devenue une militante active des droits des femmes en Afrique et une critique du système néocolonial qu’a connu la plupart des nations africaines nouvellement indépendantes. Elle était également préoccupée par un certain nombre de questions féministes telles que la polygamie, les mauvais traitements infligés aux femmes dans la société sénégalaise, l’ostracisme des castes, l’exploitation des femmes, les violences à l’égard des femmes et le manque d’opportunités d’éducation pour les filles. Jeune institutrice, elle comprend que l’éducation et le militantisme au sein de mouvements associatifs constituent de puissants vecteurs de transformation sociétale. Elle s’appuie sur la littérature pour toucher un large public et l’aider dans son combat. Son 1er et le plus important roman, « Une si longue lettre », a été publiée en 1979. Il s’agit d’un ouvrage de référence de la littérature africaine. Son roman a été traduit dans de nombreuses langues et est étudié dans les cours de littérature francophone dans le monde entier. « Une si longue lettre » est un roman épistolaire, écrit sous la forme d’une lettre d’une veuve adressée à une amie qui vit aux Etats-Unis à la suite du décès de son mari. La veuve est aux prises avec sa situation polygame, la montée de la modernité et l’occidentalisation. Elle raconte que malgré le fait que son mari ait pris une autre femme après 25 ans de mariage, elle est restée fidèle à ses valeurs et à sa religion. Sa force tranquille, son sens du bien commun et son courage contrastent directement avec la représentation des hommes dans l’histoire, y compris le mari. Son deuxième roman, « Scarlet Song », publié à titre posthume en 1986, a également attiré l’attention de la communauté internationale. Le livre traite des relations interraciales au Sénégal et la lutte des femmes pour surmonter le système traditionnel de polygamie et de discrimination fondé sur le sexe. Mariama Bâ est décédée à Dakar (Sénégal) en 1981 après une longue bataille contre le cancer.
Evariste Télesphore NIKIEMA