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AWA SISSAO, ARTISTE-MUSICIENNE: « Beaucoup de jeunes artistes n’ont aucune notion de la musique »

Issue d’une famille de dix-huit filles, Awa Sissao est originaire de Dédougou et fait aujourd’hui les beaux jours de la musique burkinabè. Après avoir acquis une certaine expérience au sein des orchestres du Burkina et un passage enrichi auprès de Cissé Abdoulaye dans la formation Djamana Percussion, elle réalise son premier opus en 2006 sous le label Waga-Jam du groupe Yeleen. Dans cette interview qu’elle a bien voulu nous accorder en ce début d’année, l’artiste revient sur son parcours, sa vie familiale et son prochain album avec ATT. Lisez plutôt.

 

 

Evasion : Que devient Awa Sissao ?

 

Awa Sissao : Je suis là, l’artiste suit toujours son petit bonhomme de chemin. Je suis régulièrement en prestation, tant au Burkina qu’à l’extérieur du pays.

 

Vous êtes régulièrement entre deux avions, cela veut-il dire que ça marche bien chez vous ?

 

Tout bouge sincèrement et je peux rendre grâce à Dieu. J’arrive à tourner dans le monde, mais l’être humain n’est jamais satisfait à cent pour cent, on essaie de parfaire les choses.

 

Avec le regard du mélomane, c’est la vie en rose alors que votre début n’a pas été facile, n’est-ce pas ?

 

C’est vrai, il est facile de juger quelqu’un à vue d’œil. Dans tout travail, il y a un début et une fin. Dire que ma vie est rose, je dirai oui et non à la fois. Quand on est en bonne santé, il faut rendre grâce à Dieu. On a d’autres choses dans la vie qui ne sont pas forcément roses, mais cela relêve du privé.

 

Bien avant la sortie du premier opus en 2006, quel a été votre parcours ?

 

Le début a été très difficile, parce que je n’avais pas de moto, je n’étais pas connue, je ne connaissais personne mais je tenais coûte que coûte à faire ma musique avec Cissé Abdoulaye au sein du groupe Djamana Percussion. Il fallait marcher du quartier Pissy jusqu’à l’actuel CENASA, j’étais convaincue que je réussirai, mais il me fallait du courage. Je me suis dit que dans la vie, il faut souffrir avant de réussir.

 

N’avez-vous pas voulu jeter l’éponge à un moment ?

 

Je ne me suis jamais découragée. Souvent, sur le trajet, quand je marchais, je pleurais. Maintenant, j’en suis fière parce que c’est une grande expérience qui reste gravée dans ma mémoire.

 

Ne pensez-vous pas que les débutants de nos jours empruntent la voie facile donné ?

 

Ils aiment la facilité, c’est ce que j’ai remarqué. Beaucoup sont venus vers moi et quand je leur ai dit de venir pour qu’on travaille d’abord, ils ne l’ont pas accepté. Ils sont pressés, ils veulent tout de suite entrer en studio et sortir un album. Bref, on n’a pas les mêmes moyens et à notre temps, la technologie n’était pas trop avancée comme aujourd’hui. Actuellement, dans les studios, c’est du couper-coller. Je leur demande de prendre du temps pour apprendre, aller à l’école avant de venir sortir un album. On ne peut pas vouloir rayonner à l’international en faisant des play-backs. Beaucoup de jeunes artistes n’ont aucune notion de la musique.

 

Comment s’est faite votre rencontre avec Smarty et Mandowe de l’ex-groupe Yeelen qui vous ont permise de sortir votre premier album en 2006 ?

 

J’ai toujours la nostalgie du groupe Yeleen. C’est grâce à ses deux membres que j’ai pu sortir mon premier album, je n’oublie pas aussi Walib Bara qui était leur manager. C’est vrai qu’on se connaissait mais pas dans le milieu de la musique en tant que tel. Eux, ils avaient des albums et étaient beaucoup connus alors que moi, j’étais dans les orchestres. On s’est croisé à Bobo-Dioulasso lors d’une formation en technique vocale, ils m’ont découverte dans la salle et c’est parti comme ça.

 

Que représente ce premier album pour vous ?

 

C’est cet album qui m’a révélée et qui m’a permise de voyager à travers le monde. Il m’a apportée beaucoup de bonheur, de créativité. Cet album est pour moi un don de Dieu.

 

Comment faites-vous pour rester humble comparativement à certaines stars qui se prennent la tête ?

 

Pour moi, l’humilité c’est être humain. On est aujourd’hui ce qu’on est et on ne sait pas qui on sera demain. Je me suis faite une conception de la vie. J’ai envie de donner le maximum de joie et de bonheur autour de moi avant de tirer ma révérence. La vie est faite d’amour et il ne doit pas avoir de place pour la haine dans nos cœurs. C’est le fait de croiser les gens qui m’inspire dans l’écriture de mes chansons. L’humilité doit faire partie obligatoirement de la vie des hommes publiques. On ne connaît pas le monde, mais le monde nous connaît. De la même manière que la star monte, c’est comme ça elle peut descendre, on a vu des cas similaires. Quand on refuse d’être éduqué, c’est la rue qui nous éduque, La musique est un métier ingrat.

 

Peut-on dire que Sissao a réussi sa vie côté musique ?

 

Je m’en sors quand même, j’ai réussi à m’ouvrir des portes. Ça va, je ne me plains pas et c’est grâce à Dieu. Avant de dire que ça ne va pas, il faut savoir qu’il y a des gens qui vivent des situations pires.

 

Etes-vous toujours en contact avec vos amis de galère ?

 

J’ai fait l’enfance à Dédougou, et quand j’arrivais à Ouaga, j’avais une seule amie qui est Kady Boly, elle est actuellement mariée à Bamako. Elle est l’actuelle femme du DG de Seydoni production au Mali. Après, j’ai rencontré d’autres amies comme Salimata Kiénou. Je n’ai pas eu beaucoup d’amies, les deux que j’ai citées, nous étions toutes des danseuses au sein de Djamana Percussion. On est toujours en contact.

 

Quelles sont vos relations avec les autres artistes surtout de la gent féminine ?

 

C’est compliqué avec les femmes. La femme en tant que telle est mesquine. On n’arrive pas à se comprendre mais je ne sais pas pourquoi. Moi, je n’ai pas de problème avec quelqu’un. Je ne pense pas avoir frustré quelqu’un.

 

Quels sont vos projets ?

 

Je suis en train de préparer le prochain album avec ATT. On compte faire un duo sur toutes les chansons au lieu d’évoluer en solo. On se complète sur scène et c’est mieux de faire chemin ensemble comme on vit ensemble. C’est comme une entreprise familiale, quand on doit aller en solo, il faut deux budgets, mais à deux, on arrive à économiser et à organiser mieux notre famille. On est confondu, je ne sais pas si c’est parce qu’on est marié, on se complète. Récemment, lors d’une tournée au Canada, il a fait la guitare et moi le chant, on fait des spectacles de près de deux heures.

 

Comment s’est faite la rencontre avec ATT qui est votre mari ?

 

On est tous de la même ethnie et on se connaissait depuis très longtemps. On se côtoyait dans les orchestres depuis près de quinze ans. Quand j’avais des prestations, je le plaçais en tant que guitariste et lui aussi quand il avait des occasions de scène, il me proposait comme chanteuse.

 

Ne déroutez-vous pas vos fans dans cette histoire de duo ?

 

Pour l’instant, on n’a pas fait un album à deux. Après réflexion, ce qui nous arrange, c’est d’évoluer en duo. Il y a des expériences qu’on a vécues et l’idéal est de continuer en duo.

 

Combien d’enfants

avez-vous ?

Nous avons une fille de cinq ans.

Quels sont vos vœux pour cette année 2018 ?

 

D’abord, je vous dis merci d’avoir pensé à moi, je dis merci à mes fans et au peuple burkinabè. Personne ne naît méchante, qu’il y ait beaucoup de pardon et je souhaite la santé à tous les malades. Tout est entre les mains de Dieu. Que Dieu exhausse les vœux de tout un chacun. On est tous dans le même bateau. Je vous souhaite à toute la joie de vivre.

 

Vous avez également un espace culturel, qu’en est-il ?

 

C’est un espace de live, je n’ai pas encore fait son ouverture officielle, vous serez invités au moment opportun. Il y a un groupe qui y joue chaque soir sauf les lundis, et les jeunes peuvent venir s’y former.

 

Vous êtes issue d’une famille de dix-huit filles, que deviennent les autres ?

 

Elles vont bien, je suis la seule à faire la musique.

 

Etes-vous prête à voir votre enfant chanter ?

 

Que Dieu donne l’idéal à mes enfants. Pour moi, tout est entre les mains de Dieu.

 

Quels sont vos pires et meilleurs souvenirs ?

 

Je ne pense pas avoir de mauvais souvenirs car tout est une question d’expériences. Toute expérience est une grâce. Je n’ai pas de mauvais souvenirs, je n’ai que des leçons de vie. Les meilleurs souvenirs, c’est la joie que je gagne avec mes fans.

 

Qu’avez-vous à dire à nos lecteurs pour clore cette interview ?

 

Je vous dis merci pour tout ce que vous faites pour la culture, on aura l’occasion de reparler du projet du nouvel album. Que Dieu donne longue vie à votre journal.

 

Propos recueillis et transcrits par Aboubakar Kéré KERSON

 

 

 

 

 

 

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