Nourat est d’origine burkinabè, elle a débuté sa carrière musicale solo en 2012 avec un album de variété musicale tradi-moderne de chez elle avec un album « Daaré ». Elle remporte le Kundé du meilleur artiste féminin au Burkina Faso en 2013. Aujourd’hui, elle s’est convertie dans le style reggae avec son orchestre « Les Lions », et ça marche très bien pour elle. Nourat et « Les Lions » étaient au FEMUA (Festival des Musiques Urbaines d’Anoumabo) du 25 au 30 avril 2023 à Abidjan, la capitale économique de la Côte d’Ivoire. Elle était la seule artiste du Burkina Faso à être invitée à cette édition au FEMUA 2023. A quelques heures de sa prestation, quand elle a fini sa balance, nous avons voulu en savoir plus sur sa carrière, sa participation au FEMUA, comment elle a été invitée ici à Abidjan, son style à bâtons rompus. Elle a répondu sans détour à nos préoccupations.
Qui est Nourat ?
A l’état civil, je me nomme Zoma wendgouda Honorine Nourat, artiste-musicienne burkinabè Reggae woman
Les mélomanes vous ont connue dans un autre style et aujourd’hui, vous avez embrassé le Reggae. Pourquoi cela ?
Il faut dire que j’étais passionnée du Reggae même quand j’étais avec mon producteur pour le premier album Daaré et il y avait un titre Sweet of freedom que j’ai repris dans l’album que j’ai fait avec Les Lions en Reggae et je voulais le faire en Reggae mais la maison de production ne voulait pas de Reggae. La passion dépasse toute chose et j’ai laissé parler mon cœur, j’ai emprunté le chemin du Reggae et je compte y rester.
Donc Nourat aujourd’hui c’est du style Reggae pas autre chose ?
Oui ! Reggae et pas autre chose.
On remarque que les femmes, au Burkina comme ailleurs, ne se lancent pas dans le reggae, qu’est-ce qui explique cela ?
Effectivement, c’est un genre musical pratiqué beaucoup par les hommes et je ne saurai dire pourquoi les femmes ne le pratiquent pas. Peut-être qu’elles se disent que c’est une musique de combat, d’engagement donc les hommes sont mieux placés pour cela. En ce qui me concerne, j’étais passionnée du Reggae et par le Reggae, j’arrive à véhiculer le message que je veux. Je pense que s’il y a d’autres femmes qui sont passionnées comme moi, il ne faut pas qu’elles hésitent. Les femmes ont peur, parce qu’elles se disent que c’est un milieu d’hommes, que c’est difficile et ça se vend difficilement.
Quand on parle de Reggae, les gens ou le citoyen lambda voient drogue, cigarette, alcool, etc. Vous qui êtes femme, vous n’avez pas peur que ces préjugés vous collent à la peau ?
Déjà en Afrique, quand tu es artiste, tes propres parents te voient comme quelqu’un qui n’est pas normal, car ils ne perçoivent pas la musique comme un travail, un métier. Et en plus de cela, être Reggae man ou Reggae woman, tu as déjà tous les préjugés, les stéréotypes sur toi. Mais moi, je pense qu’on ne peut pas empêcher les gens de dire cela. Effectivement, il y a beaucoup de personnes qui sont dans le Reggae qui fument l’herbe, c’est comme si c’est l’accent des rastas. Mais, je pense que c’est une mauvaise compréhension de la chose, parce que les vrais Rastas la prennent pour faire leurs prières, leurs incantations, c’est spirituel. Mais la jeunesse a pris cela pour autre chose. Donc, nous aussi, dans ce que nous faisons et dans ce que nous chantons, nous devons sensibiliser. Ce n’est pas parce qu’on porte des dreads qu’on est un délinquant, qu’on doit forcement fumer la drogue. Je connais des rastas qui ne fument même pas la cigarette. Alors, tout cela fait partie des combats pour changer les mentalités.
Nourat au FEMUA, c’est une première. Comment s’est faite la sélection pour que vous vous retrouviez sur la grande scène du FEMUA ?
Déjà, je vais dire merci à Gaou production, à Magic System. Effectivement, on a sorti notre album en juin 2022 et après l’album, on a fait un concert au CENASA en octobre 2022 (mon groupe et moi). En ce moment, il y avait le coup d’Etat au Burkina Faso et c’était vraiment chaud, ça n’a pas été du tout facile pour l’organisation de ce concert, mais on n’a pas voulu annuler. Et c’est à l’issue de ce concert que j’ai commencé à entendre les échos du FEMUA et après A’salfo m’a jointe au téléphone pour me dire que je suis retenue avec mon groupe musical pour le FEMUA. Cela a été une grande joie pour moi et mon groupe et comme je l’ai dit, c’est un grand défi aussi parce que c’est une grande scène avec de grosses têtes de la musique africaine, donc, on doit travailler nos trips pour bien représenter le pays.
Après la grande scène du FEMUA, quel sera le programme de Nourat à Abidjan, quand on sait qu’Abidjan est un grand carrefour de la musique Ouest-africaine ?
Le FEMUA est une grande opportunité pour nous de faire des émissions radio, télévision, interviews presse écrite ici à Abidjan, des promotions de rencontrer des vieux pères du Reggae. Quoi qu’on dise, la Côte d’Ivoire est la capitale du Reggae africain car il y a des vieux pères comme Alpha Blondy, Tiken Jah Fakoly. Je vais essayer de voir si nous pouvons entrer en contact avec eux, avoir des bénédictions, voir s’il y a des occasions de feat et bien d’autres. C’est une opportunité pour moi.
Après le FEMUA, quel est le programme musical de Nourat chez elle au Burkina et partout ailleurs?
Surtout au Burkina, on aimerait encore et comme vous le savez, on va demander à Dieu de nous accorder la paix. On ne savait pas que l’insécurité prendrait une telle ampleur. Voir des gens qui souffrent, avec l’incapacité de leur venir en aide, nous rend vraiment faibles. Comment trouver la force pour galvaniser ces personnes, et toi-même avoir un moral au top ? On demande à Dieu la paix car lorsqu’il y a la paix, on peut faire des projets.
Il y a des artistes Reggae en Côte d’Ivoire avec lesquels vous aimerez avoir des featuring ?
J’ai déjà parlé de Tiken Jah Fakoly et Alpha Blondy. Ce sont nos pères dans le domaine de la musique reggae, donc j’aimerais bien faire des featurings avec eux parce que ce sont eux qui ont tracé le chemin en Afrique de l’Ouest et ce sont eux qui peuvent m’accompagner et je serai très ravie de faire un featuring entre l’un des deux ou même les deux.
Un mot à l’endroit des Burkinabè qui te suivent dans ta carrière musicale et la communauté ivoirienne :
Je suis très honorée d’être ici en Côte d’Ivoire, là où il y a beaucoup de mes frères et de mes sœurs. Je vous remercie d’être sortis massivement pour communier ensemble, hisser haut le drapeau du Burkina. On va dire merci à la Côte d’Ivoire de m’avoir accueillie, merci à Gaou production « Djah bless ».
Interview réalisée à Abidjan par Evariste Télesphore NIKIEMA